À l’adjoint au maire de Lyon 3ème délégué au sport

Contrairement à mon habitude dans cette rubrique, j’ai tenu l’intéressé informé de la publication de cette lettre ouverte.

Monsieur,

Je vous avoue que je suis un peu surpris par votre réponse concernant l’attribution des créneaux du gymnase Mazenod.

Je suis un peu obligé de remercier la mairie de nous avoir laissé 2 créneaux par semaine pour pouvoir pratiquer notre discipline. Pendant 9 ans, quand même…

Ce qui me convient moins, c’est qu’après ce travail de longue haleine, tout s’arrête brutalement.

Ce qui me convient encore moins, c’est que vous ayez attendu le 18 juillet pour nous annoncer que nos créneaux nous ont été retirés.

Bien sûr, le fait que nous n’ayons pas été conviés à la traditionnelle réunion annuelle de discussion sur la répartition de la salle entre les différentes associations est un hasard. Bien sûr aussi, lorsque vous avez répondu à mon courrier − rédigé après avoir appris fortuitement la tenue de la réunion sans notre association − en m’annonçant déjà qu’il était possible qu’il y ait des difficultés pour nous, vous ne saviez pas déjà que l’affaire était entendue depuis longtemps. Bien sûr…

Au final, nous nous retrouvons à un mois et demi de la rentrée, en pleine période de vacances, pour essayer de trouver une solution pour pouvoir poursuivre notre activité. C’est gentil à vous de nous avoir prévenu dès que possible, montrant ainsi toute l’estime que vous portez aux associations qui, comme le répète inlassablement le politicien moyen dans ses beaux discours, sont « si importantes pour la cohésion de notre tissu social ». Jolis mots, mais vidés de toute sincérité, comme toujours en politique.

Plutôt qu’une décision à l’emporte-pièce, j’aurais préféré une explication claire. Je suis capable d’entendre que ce que je fais est moins intéressant qu’autre chose, mais vous ne savez même pas ce que je fais. Pendant 9 années, vous nous avez laissés pratiquer sans jamais chercher à savoir ce que nous faisions vraiment. Tout comme vous ne cherchez pas à savoir où nous en sommes après 9 ans. De mon côté, je ne sais pas non plus ce que feront ceux qui prendront ces créneaux. Comme vous… Qu’importe pour vous, une association ou une autre, quelle différence ? La décision ne dépend que des pressions extérieures, plus ou moins fortes. Je sais même qu’il y aura des pressions sur vous en faveur de notre association. Mais je n’en veux pas. J’ai suffisamment d’honnêteté pour vouloir être jugé sur mon travail, et non sur mes appuis, même amicaux. Et suffisamment d’honnêteté pour accepter une décision en notre défaveur si elle est justifiée.

Vous ne connaissez rien à l’aïkido, et même si vous êtes pratiquant de karaté, vous n’avez certainement aucune idée de notre art. Vous attendez des résultats, nous n’avons pas de résultat à vous donner. Il n’existe pas de compétition en aïkido, car l’aïkido n’est pas un sport. C’est un art de vivre. L’aïkido a su préserver ce qui faisait la grandeur d’un art martial : transmettre des valeurs nobles : respect, sincérité, honneur, courage, loyauté, générosité. Le dérapage vers le sport a fait disparaitre ces valeurs pour d’autres, comme la tricherie (qui est indispensable, aujourd’hui, pour obtenir le seul résultat qui compte : la victoire). Au passage, vous avez perdu le respect d’autrui, comme vous nous l’avez montré dans votre comportement à notre égard.

Il est probable que mon discours vous arrange car, finalement, votre titre est « adjoint délégué au sport »… pas à l’art ou la culture. Le seul problème, c’est que nous avons besoin de « salles de sport » pour pouvoir pratiquer. Nous n’avons jamais fait la moindre demande de subvention, contrairement à la plupart des associations, parce que nous n’avions besoin que d’une chose : un lieu pour notre pratique.

Personnellement, je suis capable d’accepter de renoncer à l’enseignement. J’enseigne totalement gratuitement, et je n’attends rien de mes élèves… sinon qu’ils prennent du plaisir à pratiquer. Je leur transmets ce que je sais, et ils sont libres d’en faire ce qu’ils veulent. J’ai cru comprendre que ma passion pour l’aïkido s’est transmise. Je suis peiné pour ces élèves qui devront trouver ailleurs (ou pas) ce qu’ils cherchaient et ont trouvé dans mon dojo. Une belle aventure va se terminer si nous ne trouvons pas de solution. Mais ce n’est plus votre problème…

Mon fils m’a dit : « Mais pourquoi perds-tu ton temps à écrire, tu crois que ces gens ont une conscience ? » Vous savez ce que je lui ai répondu ? Que sa question me servira de conclusion, parce que je ne sais pas quoi répondre… sinon que c’est une bonne question !

Mes salutations… les plus minimes qui soient pour me permettre de rester dans la limite de la politesse.

PS : Puisque vous êtes pratiquant d’art martial, je vous invite à lire cette réflexion personnelle sur le shisei : ici.

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