Je trouvais un peu dommage de laisser un article grinçant comme dernier article publié, avant fermeture. Je me suis dit que ce serait bien de finir sur quelque chose de plus léger…
Ben tiens, j’ai justement deux sujets sous le coude ! Je me propose d’abord de répondre à une question de monsieur Leibniz : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » − mauvaise question, mais je développerai après − et puis, pour finir, j’aborderai le pari de Pascal. Alors votre attention, s’il vous plait, je ne voudrais pas perdre du monde en chemin ! Comment ? Non… plus léger, j’ai pas !
Commençons par une question prétendument fondamentale de la philosophie classique « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » J’ai, donc, la réponse. C’est… « Parce que c’est pareil ! ». Pour être plus clair, la question n’a pas de sens. C’est comme si on demandait à quelqu’un pourquoi il fait un choix plutôt qu’un autre sur un critère qui ne différencie pas les objets du choix…
Je m’explique. Prenons la situation suivante : vous devez choisir entre deux pierres noires, une petite et une grosse. Si je vous demande pourquoi vous avez choisi l’une plutôt que l’autre, vous pourrez me répondre, par exemple que la grosse sera d’un plus bel effet sur l’étagère de votre salon, ou que vous choisissez la petite parce que vous avez du chemin à faire et que ce sera moins fatiguant à porter. Mais si je vous demande pourquoi vous avez choisi une pierre noire, vous ne pouvez pas répondre. Maintenant remplaçons « noire » par « sensé » et replaçons-nous dans la question qui nous intéresse un peu plus… Qu’il y ait de la matière n’a pas plus de sens que s’il n’y en avait pas. C’est une caractéristique commune de la matière et du néant, que de n’avoir pas de sens… J’espère que je n’ai pas perdu trop de monde, jusque là… Bon, repêchage pour les moins réveillés : c’est comme si on vous demandait « pourquoi la pierre noire, plutôt que la pierre noire ? » Oui, mauvaise question, je ne vous le fais pas dire !
Prenons un exemple pratique de non sens de « quelque chose » : les dinosaures qui nous ont précédés sur cette planète. Quel sens y a t-il au fait qu’ils aient existé ? Bien d’accord avec vous, aucun ! Autre exemple : quel sens y a-t-il, à l’échelle de l’Univers, qu’il y ait la Terre plutôt que rien (voir lettre à l’autorité) ? Bon, je vois qu’on avance.
En somme, en admettant qu’il y ait une entité qu’on appellerait Dieu (hypothèse, attention), et qu’il ait la possibilité de choisir entre matière ou rien, il pourrait s’en foutre complètement (d’ailleurs, je me demande s’il ne se fout pas un peu de tout… toujours dans l’hypothèse où il existerait) puisque les deux options ne présentent pas plus de sens l’une que l’autre. Je pense donc que devant ce choix, il a sorti une pièce de monnaie et il a tiré à pile ou face. Et comme c’est tombé sur pile, et que pile c’était matière, la matière a été créée. On n’a pas plus de sens, mais on a de la matière. Ça prend plus de volume, comme si qu’il avait choisi la grosse pierre… noire. Donc, si « Dieu ne joue pas aux dés », comme le pensait Einstein, selon moi il avait au moins une pièce dans sa poche pour quand il se forçait à faire un choix sans intérêt (Dieu, pas Einstein, si vous voulez bien suivre un peu). Bon, ce n’est qu’une interprétation, attention…
Vous avez le droit de penser que notre espèce est la quintessence de la création de l’Univers… Mais moi, c’est marrant, je ne vois pas l’Homme comme ça. Je dois être un peu con, c’est sûr. Il suffit de regarder ce que font les Hommes et comment ils vivent et se comportent envers leurs semblables pour se rendre compte du sens indubitable qu’a l’existence de cette merveilleuse espèce.
Idem pour les productions humaines, comme ce blog. Production ou pas, c’est pareil, donc. Si on le pense, autant aller jusqu’au bout du raisonnement, et effacer ses traces, n’est-ce pas ? Vous me direz, j’aurais pu le faire plus tôt, mais il m’a fallu du temps pour arriver là. Parce que… une conclusion pareille n’arrive pas du jour au lendemain. Il faut noircir des pages et des pages avant.
Pour finir aussi sur de la philosophie un peu légère, je voudrais parler du pari de Pascal… Vous savez, celui qui consiste à choisir de croire en Dieu, parce qu’on n’a rien à perdre s’il n’existe pas, et tout à gagner si on a bon. Je suis en train de vivre ça avec mon père, qui s’approche du grand départ. Et je peux vous dire, au passage, que je ne renie absolument rien de ce que j’ai écrit sur la réanimation des vieux… On pouvait dire que c’était de la théorie, que ce n’est pas pareil quand il s’agit des « siens » ; mais en pratique, je confirme bien : même discours pour tout le monde, même les miens ! Vivre en bonne santé n’a déjà pas tellement de sens (voir le thème précédent), mais vivre malade et diminué − c’est à dire vieux, quoi −, alors là… Merci la médecine ! (je reconnais que j’exagère un peu… c’est vrai qu’ils sont tellement mignons avec leur couche !)
Mon père, donc, plutôt trouillard de nature a bien capté cette idée-là et y a souscrit, forcément : pas prendre de risque et tout à gagner, ça lui plait bien. Sauf que, ça ne marche pas ! Parce que, pour être vraiment apaisé face à la mort en pariant, il faut vraiment croire en Dieu. Ça, je le sais parce que ma mère était vraiment croyante, et elle avait avec la mort une relation très sereine. Pas mon père qui n’a pas spécialement envie de vivre (en tout cas, il ne fait que se plaindre : de la vieillesse, de la diminution, des soins que pourtant il demande… de tout, je vous dis, ça ne va jamais − l’exact contraire de feue ma mère −), mais ne veut pas du tout mourir parce qu’il a très (très) peur de la mort. De ce qu’il y a après, de s’il y a quelque chose, déjà, de ne pas savoir ce qui va arriver sur Terre après son départ… Une souffrance permanente que l’idée de mourir. Je lui ai pourtant expliqué que je n’arrivais pas à le plaindre, lui, parce que je vois des gens jeunes mourir, au boulot… Et aussi que la seule façon de ne pas vieillir, c’est de mourir jeune… Rien à faire !
Bref : arrivé à 86 ans sans avoir rien compris, à se demander pourquoi il faut mourir, à répéter que c’est injuste, que pourquoi ça doit lui arriver à lui, etc. (Dommage avec un cerveau pareil…). On pourrait croire que c’est l’approche de l’échéance qui l’angoisse, mais je me souviens l’avoir toujours connu très préoccupé par cette drôle de nécessité de quitter la vie, la nature n’ayant pas pris en compte son cas particulier qui, semble-t-il, se serait mieux satisfait d’une immortalité…
Pour revenir au premier sujet, et avant de conclure sur le pari de Pascal, de mon côté je suis plutôt serein, bien que non croyant, pour ce qui est de la mort. Comment pourrais-je être attaché à ce qui n’a pas de sens, la vie (…quelque chose), plutôt qu’à la mort (…rien) qui n’en a pas plus, de sens ? Passer d’un non sens à un autre ne me dérange pas. Détaché de tout, en somme. (Alors pourquoi pas de ce blog ?)
Une parenthèse pour que nous soyons bien d’accord : l’idée du suicide ne me convient pas, pour la simple raison qu’il suffit d’un peu de patience pour arriver au même résultat − disparaitre − mais je n’hésiterais pas à utiliser la méthode si les conditions de ma vie devenaient inacceptables. Pour l’instant, c’est cool pour moi, et même assez amusant puisque je regarde le monde un peu à la façon de Démocrite, comme de l’extérieur, alors je reste.
Le pari de Pascal, donc… Outre d’être assez mesquin, ça ne marche même pas en pratique. Une escroquerie, voilà ce que c’est ! Je lui dirais bien, à Pascal, la même chose qu’Alexandre Astier, à la fin de son fameux sketch sur la physique quantique (à voir absolument !) : « Blaise Pascal, ça… c’est pour ton p’tit cul ! »