Autolyse

Aïe ! Mauvais signe ! J’écris… Je vais donc bien le faire…

En général, quand je commence à écrire quelque chose qui me trotte dans la tête, c’est que le truc est digéré, sans que j’en aie encore pleinement conscience. Et presque sans savoir encore exactement ce que je vais écrire, tout s’enchaine sur le clavier. Alors le truc en question, c’est quoi ?

Comme le titre l’indique, il s’agit de disparition programmée (et accessoirement réfléchie). Une sorte de suicide. Bon, ce n’est pas très grave, c’est la disparition de quelques textes sans importance. Ah oui, je ne vous ai pas encore dit, mais ce qui va s’autodétruire, c’est ce blog…

J’y croyais, pourtant, à l’intérêt de ce blog. Enfin non… Plus exactement, je voulais y croire.

Je m’étais donné des règles dont une qui devait prévaloir sur les autres. Les règles, c’était de me faire plaisir, et aussi de ne pas me raconter d’histoire. Celle qui devait prévaloir, c’était qu’il fallait aborder des sujets dérangeants, avec des arguments dérangeants. Sinon, quel intérêt que j’écrive ? Pour moi, d’accord, mettre un peu d’ordre dans mon petit cerveau (ça, c’est fait, merci), mais pour les autres ? Juste raconter mes états d’âmes ? D’autres le font. De plus en plus le font, d’ailleurs, ce qui a tendance à créer chez moi une lassitude certaine… J’espère que certains ont pu trouver que ce que j’écrivais ne ressemblait à rien d’autre qui se trouve déjà sur le Net. Je souhaite ne pas être assimilé à ces âmes en peine qui veulent absolument exister, parce que vivre pour rien n’a vraiment pas de sens, n’est-ce pas ? Bon, moi ça fait longtemps que je le sais que la vie n’a pas de sens, mais je voulais juste écrire que ce n’est pas si grave. Enfin, ce qui n’est pas si grave, c’est que la vie de l’individu n’ait pas de sens. Ce qui est grave − et je voulais l’écrire aussi − c’est que le comportement de l’humanité soit insensé. Mais bon, rions-en, comme Démocrite…

Quel est le bilan ? 59 billets, en 2 ans et quelques mois. Pas une virgule à changer… Enfin, je veux dire qu’aujourd’hui encore, dans aucun des textes je ne changerais une virgule. Nombre de visites quotidiennes : une dizaine (nombre à relativiser, nous le verrons plus loin, avec les visiteurs « indésirables »), avec un petit pic à une centaine par jour pendant 2 jours quand un nouveau billet paraît.

Je ne cherche pas la performance, mais je crois qu’il faut regarder les choses en face : ce blog n’intéresse pas. Un blog intéressant fait son chemin, par le bouche-à-oreille. Si après aussi longtemps il ne l’a pas fait, il faut admettre qu’il ne vaut pas grand chose. Pas dans l’absolu, peut-être, mais en pratique, oui. S’il n’intéresse pas, c’est qu’il ne touche pas. Ou s’il touche, c’est 200 « allumés » (du même feu que moi, quoi), c’est à dire personne si on considère les possibilités de diffusion offertes par cet incroyable système qu’est Internet.

Les commentaires… Bon, les commentaires auxquels j’ai eu droit me vont bien, c’est déjà ça. J’aurais eu un peu les boules d’avoir des « oh, c’est trop mignon ce que tu écris, je ressens tout pareil » (je ne caricature même pas !). Aucun intérêt… Au moins, de ce coté là, je n’ai pas eu à me plaindre, les commentaires étaient bien, globalement.

Le jeu, c’est de ne pas faire le tri dans les commentaires, sinon c’est trop facile… Enfin, si, il y a les « indésirables » quand même, écrits en anglais, en russe ou en espagnol qui vantent, il me semble, les mérites de médicaments (en particulier ceux concernant la fonction érectile), de godasses, de filles, ou qui expliquent que votre site est super bien, mais qu’il faudrait maximiser le nombre de connexions (moyennant finance, peut-être…). Bilan de tout ça : 77 commentaires publiés − dont 19 par moi ! − pour… 1123 indésirables. Et indésirables, ça veut dire que les auteurs sont interdits de nouvelle entrée, pas qu’ils sont juste refoulés ! Cela signifie qu’il a fallu que 1123 fois je me reçoive un courriel et que je coche « indésirable » sur le blog… Vous l’avez compris, cela ne m’amuse pas vraiment. C’est dommage de se priver des commentaires, mais j’arrive à comprendre qu’un blogueur puisse ne simplement plus les autoriser (comme Christian Lehmann, par exemple).

Moi, avec un bilan pareil, je fous tout à la poubelle… et puis c’est tout !

Que vais-je donc faire maintenant, alors ? Ben, maintenant, je vais attendre paisiblement la mort. Ne vous focalisez pas sur « mort », c’est sur « paisiblement » qu’il faut se focaliser. J’ai écrit quelque part que l’écriture m’a permis de poser des poids un peu lourds que je portais sur les épaules (l’organisation du monde et le comportement des Hommes, ça pèse quand on n’arrive pas à comprendre). On se sent mieux parce qu’on a agi, plutôt que ruminer sans cesse les mêmes incohérences d’un monde absurde. Ce blog était le sac où j’ai déposé tout ce matériel qui me pesait. Maintenant, je vais y foutre un grand coup de pompe, à ce sac, parce qu’il ne me sert plus à rien, et il ne sert à personne (ou presque). Ceux qui veulent revoir quelque chose là-dedans ont un mois pour le faire. Après, tout part à la benne (heu… au placard, ça suffira).

Il y a quelques années, j’ai vu un film dont j’ai oublié le titre et l’histoire, mais j’ai gardé le souvenir d’une scène qui se passait dans les montagnes américaines, dans un lieu sauvage couvert de neige, et alors qu’il avait un champ à traverser, l’Indien fait un détour. L’homme blanc qui l’accompagnait lui demande pourquoi il ne prend pas le chemin le plus court, et l’autre lui répond qu’il veut laisser le minimum de traces visibles pour ne pas déranger la beauté naturelle du lieu, même si personne ne passait dans le coin. Je raconte cette histoire parce que l’idée de laisser le moins de traces inutiles me plait bien (tiens, je me rends compte que cette idée était déjà dans mon CV…).

Il me revient en tête le début et la fin du poème intitulé « If », de Rudyard Kipling : « Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie, et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir… Tu seras un homme, mon fils. » Et j’ai envie de le transformer un peu, pour cette version : « Si je peux détruire moi-même l’ouvrage de ma vie, et sans dire un seul mot ne rien rebâtir… Je ne serai plus un homme, mon père… et ça m’ira très bien, ça ! ».

Je dois dire aussi que j’ai une grande envie de retrouver des plaisirs simples comme celui de profiter de la nature en utilisant ce qui me sert de membres inférieurs à autre chose que de rester assis. Oui, je commence à en avoir marre de passer l’essentiel de mon temps devant l’écran de l’ordinateur, à regarder, lire et entendre le monde à travers cette (putain de) lucarne, marre de la montagne d’informations sans intérêt présente sur Internet qui me fait perdre mon temps à essayer de trouver quelque chose de bon dans cet océan de données où le pire côtoie le meilleur, sans distinction. Et si distinction il y a, par des programmes sophistiqués (nous dirait DD…), alors, je n’ai plus de doute : ce que j’ai écrit est vraiment sans intérêt !
Donc assez de pollution. Je ne vais pas critiquer les autres sans balayer devant ma porte… Ne pas exister sur le Web ne me dérange pas. Il vaut certainement mieux ne pas exister qu’exister mal… Tiens, c’est pas mal, ça, pour un mot de la fin !

Ben non, ce ne sera pas le mot de la fin, parce que je n’ai pas fini…

Cette sorte de suicide virtuel qui me fait disparaître de la Toile, je ne le trouve non seulement pas douloureux, mais je le ressens comme agréable. L’idée de disparaître me convient assez bien. N’être rien, ne pas exister ! Je crois que l’idée était déjà dans certains textes où je disais clairement que je ne voulais pas participer (aux élections, à la mutualité).

Déjà il me semblait que j’étais prêt à quitter la vie quand le moment se présentera, mais je ne pensais pas que je pourrais peut-être la quitter avec une sorte de plaisir. Ce serait cool, ça ! À repenser tranquillement, ce truc-là…

Ce qui m’ennuie un peu, quand même, c’est de supprimer l’hommage à Alexandre Astier. Le texte sur Henri Laborit, je m’en occupe. Je vais le filer à un ami québécois, Bruno Dubuc, qui pourra en faire ce qu’il veut. C’est un passionné de Laborit. Même père spirituel, nous sommes donc frères spirituels. Il avait mis un lien vers mon texte sur son site, peut-être acceptera-t-il de l’héberger directement !?

Pour les amis qui apparaissent ici ou là sur le blog, il faudra qu’ils s’habituent à ce que le monde entier ne sache plus qu’ils sont mes amis. Mais je les garde quand même !

Depuis que j’ai écrit le billet sur Laborit, résonne en moi cette phrase qui m’avait interpellé : « Que l’on se dise qu’on n’a pas fait grand chose, ou qu’on a rien fait dans sa vie, n’est pas dramatique. On n’est pas là pour faire quelque chose. On est là, autant que possible, pour être bien dans sa peau. ». Je sais qu’il avait raison… et plutôt que de faire absolument quelque chose, je vais m’occuper seulement d’être bien dans ma peau. Cela commence par faire le vide, on dirait, puisque l’idée me plait bien…

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