Vaccination chaotique

Le Formindep est une association « pour une formation et une information médicales indépendantes de tout autre intérêt que celui de la santé des personnes ». C’est aussi un forum de discussion entre les membres. Je profite de la « veille informationnelle » pour découvrir ce qui se se dit ou se fait qui touche de près ou de loin les préoccupations de l’association. Dernièrement, un des membres particulièrement actifs (Dominique Dupagne pour ne pas le citer… (Salut Dominique, tu trouves pas que c’est cool les parenthèses dans les parenthèses ?)) nous a fait passer le lien d’un site sur l’histoire « parallèle » de la vaccination contre l’hépatite B, histoire qui m’a un peu fait froid dans le dos (ici).

J’ai fait suivre à un ami médecin, qui m’a répondu en me mettant en pièce jointe un texte qu’il avait envoyé à propos d’une enquête. L’enquête, c’était un questionnaire fait par des infectiologues lyonnais qui voulaient comprendre pourquoi la vaccination contre la grippe A/H1N1, aux Hospices Civils de Lyon, avait été aussi peu suivie. Ce questionnaire s’adressait donc à tout le personnel. Je n’ai personnellement pas répondu à cette enquête, même si j’avais écrit une réponse que je n’ai pas envoyée… peut-être par pitié, je ne sais pas. Voici quelle était ma réponse :

Je ne vais pas me donner la peine d’ouvrir le questionnaire car je peux répondre directement aux questions ; mon avis sur :
- la campagne de vaccination : nulle
- son organisation : nulle
- les informations délivrées : nulles
- mes motivations : forcément nulles… incapable de donner un conseil éclairé sur l’intérêt de la chose, je n’ai pris de décision que pour moi : je ne me suis moi-même pas fait vacciner (comme l’écrasante majorité des Français… ce qui donne une idée de la qualité de la communication sur le sujet !).

PS : Je pourrais aussi, si on me le demandait, donner mon avis sur la qualité de nos experts… mais je risquerais de me répéter.

PPS : Plutôt que d’enquêter sur comment nous avons vécu les choses, il me semble plus intéressant de savoir pourquoi les choses se sont passées ainsi. Ça tombe bien, une commission d’enquête sénatoriale est actuellement en train d’essayer de faire la lumière sur cette question… ici

Les vrais amis, dit-on, se comptent sur les doigts d’une main. Je n’ai pas fait le compte pour ce qui me concerne, mais Olivier VINOT en fait partie, c’est sûr. Sa lettre m’a touché par la noblesse qui s’en dégage, et je souhaitais la mettre en ligne.

Le propos de ce site étant de laisser une large place à tout ce qui peut déstabiliser une pensée formatée, je trouve que cette lettre y trouve toute sa place. Je laisse la parole à Olivier…

Quelques mots pour vous expliquer pourquoi je n’ai pas complété votre enquête sur la campagne de vaccination contre la grippe A, étant resté bloqué sur l’écran n° 7 du questionnaire où aucun des items proposés ne correspond à la raison de ma « non vaccination »…

J’insiste sur le fait que je n’ai rien contre la vaccination, bien au contraire. Je trouve que c’est un traitement médical des plus élégants, à la fois préventif dans son principe, physiologique dans son mode d’action et le plus souvent très efficace. J’apprécie ma chance d’avoir bénéficié dans l’enfance des vaccins « obligatoires » (variole, diphtérie, tétanos, polio). Je me suis fait vacciné contre l’hépatite B dès que cela m’a été proposé dans les années 80. Et je me vaccine régulièrement contre la grippe saisonnière (tous les 2 ans), non pas que je redoute quelques jours de fièvre, mais pour réduire le risque de me trouver dans l’incapacité d’assurer mes gardes ou astreintes. J’apprécie également à sa juste valeur toute la sécurité que nous apporte un niveau de vigilance sanitaire et de développement technologique tels que nous puissions disposer très rapidement de vaccins efficaces face à la menace d’un nouvel agent infectieux.

Si je n’ai pas adhéré à la campagne française de vaccination contre la grippe A, c’est que j’ai été choqué par son caractère trop égoïste. Car alors que les prévisions officielles annonçaient qu’il y aurait au mieux 2 milliards de doses vaccinales disponibles avant la fin de l’hiver, il était facile de calculer que toute la population potentiellement menacée ne pourrait pas être protégée à temps, d’autant que le scénario de la double injection a tardé à être écarté. Dans ce contexte, que les pays riches s’accaparent les premières doses de vaccin disponibles était aussi lamentable que l’aurait été le stockage des dernières ressources alimentaires à l’annonce d’une pénurie. Si la pandémie s’était révélée particulièrement meurtrière, les conséquences historiques d’une politique aussi flagrante du « chacun pour soi » aurait été certainement très graves. Comme l’a présenté avec humour un de nos confrères : « quelques occidentaux qui meurent de la grippe A, c’est une pandémie ; des millions qui meurent de malnutrition, de choléra, de sida ou du paludisme: c’est leur problème…  »
A presque 50 ans, j’estime avoir profité d’une partie appréciable de ma vie et je ne me considère donc pas comme prioritaire pour l’accès au vaccin dans un contexte de pandémie menaçante, laquelle, de mon point de vue, doit faire l’objet d’une gestion mondiale, centralisée, avec répartition raisonnée et solidaire de tous les moyens de protection disponibles. Car il est dans l’ordre des choses pour un enfant d’enterrer ses parents, pas le contraire, et ce en France comme ailleurs.

Voilà ce que j’aurais mis dans la case « commentaire » du regretté item manquant « autre raison » au 7è écran de votre questionnaire.

Cordialement

O Vinot

Au fait ! Olivier n’a jamais reçu de réponse à son courrier… Etonnant, n’est-ce-pas ?

This entry was posted in Médecine ou philo ?. Bookmark the permalink.

Comments are closed.